Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Lors de l’examen en seconde lecture à l’Assemblée Nationale du projet de loi visant à « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification », un amendement (N° AS 60, ajoutant un article additionnel 1bis après l’article 1) a été réintroduit et adopté malgré sa suppression par le Sénat et en dépit de l’opposition massive de l’ensemble des personnels concernés par cet article : Les infirmiers, les assistants de service social et les psychologues de l’Education nationale.
Les arguments mis en avant dans l’exposé des motifs, portent sur une absence de concertation et un prétendu « vide juridique » en matière d’organisation du travail des infirmiers, des médecins, des assistants de service social et des psychologues de l’éducation nationale (PsyEN). Mais telle n’est pas la réalité du terrain.
Ces personnels travaillent ensemble au sein de l'équipe éducative sur les situations d’enfants et d’adolescents, délicates et complexes, notamment lors de l’organisation des cellules de veille et des groupes de prévention du décrochage scolaire dans les collèges et les lycées ainsi que lors des équipes de suivi de scolarisation, et des réunions d’équipes éducatives dans les écoles et les établissements scolaires.
Lorsque cela ne se fait pas, cela n'est pas une volonté de ces personnels de ne pas y participer, mais cela est dû à leur présence partielle sur les établissements et à la charge professionnelle des secteurs d'intervention consécutive aux carences en effectif pointées depuis de nombreuses années mentionnées par la commission du Sénat, et aux postes non pourvus du fait du manque d'attractivité salariale d'une profession très féminisée et non reconnue dans ses qualifications.
L’investissement public dans un service social scolaire de la maternelle à l’université, en créant des postes spécifiques en primaire serait plus efficace que de gérer la pénurie en remettant en question les missions de chacun et chacune.
En réalité, la finalité des amendements proposés vise moins à instituer un travail coordonné entre ces professionnels qu’à assujettir à de nouvelles tâches les PsyEN et les assistants de service social, afin qu’ils participent aux actions de promotion de la santé, définies dans les articles du code de l’Education modifiés, en particulier les bilans de santé et les actions avec les ARS, ce que leurs missions actuelles ne prévoient pas.
Non seulement, cette modification du code de l’Education va ajouter de nouvelles obligations aux missions déjà très nombreuses que les assistants de service social ont du mal à assurer au vu de leur faible nombre mais fait entrer ces personnels sociaux sous l’étiquette de « professionnels de santé », allant à l’encontre de l’évolution historique de leurs professions respectives, leurs spécificités et témoignant d’une confusion certaine quant aux missions des différents professionnels pour lesquels complémentarité ne signifie pas interchangeabilité.
Nous souhaitons rappeler que la profession n’est pas inscrite comme personnel de santé dans le code de la santé publique mais reconnu comme l’une des 13 professions du travail social par le code de l’action sociale. Le travail social véhicule des représentations au sein de la société et de notre institution scolaire à l’image des publics précaires accompagnés, encore trop souvent discriminés.
Pour illustrer la méconnaissance de nos missions, il suffit d’évoquer la suite du mouvement #MeTooInceste où, l’école, lieu de vie des enfants et des jeunes, s’est trouvée, à juste titre, mise au centre du sujet : comment prévenir, repérer et accompagner les violences sexuelles et l’inceste ?
Faisant fi des personnels qualifiés en première ligne sur cette question, les très rares responsables politiques et journalistes évoquant le rôle pourtant essentiel du service social en faveur des élèves ont été inaudibles.
Malgré nos demandes répétées à être reçu par Monsieur le Ministre de l’Education Nationale, nous n’avons toujours pas obtenu de réponse favorable, ce qui là aussi, témoigne de la volonté du ministère de maintenir les professionnels que nous représentons dans l’invisibilité.
De manière générale, la période que nous traversons collectivement est complexe. La crise sanitaire amplifie la crise sociale déjà préexistante à la pandémie. Les situations de décrochage scolaire sont encore plus inquiétantes en nombre et en âge des élèves. Jamais le rôle social de l’école n’a été aussi essentiel. Les situations en lien avec la protection de l’enfance explosent, l’école est le premier interlocuteur des familles et le premier lieu permettant un repérage des enfants en danger ou risquant de l’être.
Et c’est bien parce que ce rôle social est désormais en première ligne qu’il est indispensable de prendre appui sur l’action quotidienne des assistants et assistantes de service social scolaire en leur laissant l'autonomie d'action que leur mission exige au sein des équipes éducatives.
Par conséquent, nos organisations vous demandent de bien vouloir intervenir pour la suppression de l’article 1 bis A qui porte en germe une dégradation prévisible de la qualité du service rendu aux élèves et aux équipes.
Vous remerciant de bien vouloir entendre et porter notre demande,
Recevez, Mesdames et Messieurs Les Parlementaires, nos respectueuses salutations.